30 août, 2007

Le financement éthique gagne du terrain

À l'image d'Axa, les entreprises prennent peu à peu en compte certaines demandes des ONG sur l'environnement, le social ou l'humanitaire.

HARO sur les bombes à sous-munitions ! Axa va cesser, en partie, de financer les producteurs de ces armes dévastatrices, remplies de centaines de minibombes qui éclatent souvent à retardement. La décision s'applique aux investissements « pour compte propre », c'est-à-dire aux fonds de la compagnie et aux primes versées par les assurés, soit 34 % des actifs d'Axa. L'assureur affirme s'adapter ainsi au « consensus politique » qui devrait aboutir à un traité international d'interdiction de ces bombes d'ici à 2008.

La nouvelle a réjoui Amnesty et Handicap International, engagées dans une longue bataille contre ces armes. « Peu ouverts auparavant à des discussions sur leurs investissements » dans les armes dangereuses pour les civils, les responsables d'Axa ont adopté une attitude « très constructive » en mars 2007, soulignent les organisations humanitaires. Les deux ONG (organisations non gouvernementales) venaient alors d'annoncer qu'elles résiliaient leurs contrats auprès de l'assureur. Même ouverture chez BNP Paribas en juin, après que les Amis de la Terre, Greenpeace et d'autres ONG ont organisé une journée européenne contre la banque en raison de sa participation au financement de la centrale nucléaire de Belene en Bulgarie. La première banque française ne reviendra pas sur le préfinancement accordé et prévoit même d'aller plus loin si les autorités européennes valident le projet. Mais Baudouin Prot, son directeur général, a reçu les dirigeants des quatre ONG. Et la banque a envoyé plus de 3 000 mails aux supporters des Amis de la Terre et de Greenpeace.

Une évolution lente

La sensibilisation des entreprises à l'investissement éthique prend souvent du temps. Trois années de mobilisation des Amis de la Terre ont précédé la décision de Point P, filiale de Saint-Gobain, de mettre fin à la commercialisation du moabi, un bois africain précieux à caractère sacré.

Plusieurs entreprises, à l'image d'Axa et de BNP Paribas, réfutent le rôle des ONG dans leur évolution, alors que d'autres sociétés mettent en avant leur coopération avec les associations environnementales ou sociales. Mise en cause en 2003, aux côtés d'Axa et de banques européennes, pour ses investissements dans des armements controversés, Dexia s'est montrée « tout de suite très ouverte », explique Sébastien Godinot, des Amis de la Terre. « Nous rencontrons chaque année les ONG qui suivent nos activités », explique Marc Rizzotto, directeur du développement durable de Dexia. Ce dialogue nous permet « d'avancer dans notre action liée au développement durable et de pointer les priorités ». La banque franco-belge s'est ainsi penchée plus vite que prévu sur les émissions de CO2.

D'autres entreprises vont plus loin encore. Accusé en 1994 d'acheter ses tapis à des fournisseurs indiens faisant travailler des enfants, le distributeur de meubles Ikea a monté un projet complet avec l'Unicef. L'entreprise suédoise sensibilise ses acheteurs au travail des enfants, contrôle ses fournisseurs et finance un programme d'éducation dans plusieurs villages.

Mais les changements restent souvent liés à l'impact que les campagnes des ONG peuvent avoir sur l'image des entreprises. À moins qu'ils ne dépendent de la réglementation. Axa considère ainsi qu'il ne lui revient pas d'empêcher les clients dont elle gère le patrimoine d'investir dans les mines antipersonnel ou les bombes à sous-munitions. Cela relève du « domaine politique et du droit international », estime l'assureur.
Le Figaro 18 juillet 2007

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