20 août, 2007

La loi Dati, facteur de récidive ?

Parfois, l'Anglais est perfide. Au coeur de l'été, quelques jours à peine après l'adoption de la loi récidive par le Parlement français, un institut basé à Londres publie une étude (1) montrant clairement pourquoi cette loi risque d'avoir l'effet inverse de celui qui était attendu ! Trois économistes, Francesco Drago (université de Naples), Roberto Galbiati (Institut universitaire européen de Florence) et Pietro Vertova (université Bocconi de Milan), ont tiré la leçon d'une mesure exceptionnelle : la loi de clémence votée fin juillet 2006 par le Parlement italien pour faire de la place dans des geôles trop pleines. Elle a réduit toutes les peines de trois années. Le 1er août 2006, près de 22.000 prisonniers ont ainsi recouvré la liberté, avec toutefois une menace. Ceux qui seront à nouveau condamnés dans les cinq ans verront leur peine allongée de la grâce dont ils ont alors bénéficié. Un criminel qui aurait dû être libéré le 1er septembre 2006 au lieu du 1er août prend ainsi le risque de passer un mois de plus à l'ombre. Celui qui a gagné deux ans de liberté risque de prendre deux ans supplémentaires. La différence de comportement entre l'un et l'autre permet de voir si la menace d'une peine plus longue est dissuasive ou non.

Les chercheurs ont pu accéder à la base de données de l'administration pénitentiaire, qui indiquait les anciens détenus à nouveau inculpés dans les sept mois suivant cette libération exceptionnelle. Leurs calculs montrent que la dissuasion marche : « Un mois supplémentaire de sentence escompté réduit la propension à commettre un crime de 1,24 %. » Un bon point pour la loi de Rachida Dati. En prévoyant des peines planchers pour les récidivistes, elle devrait effectivement dissuader les aspirants délinquants. Seulement voilà : le temps déjà passé en prison agit dans l'autre sens ! « Une plus longue période passée en prison tend à affaiblir et non à renforcer l'effet dissuasif d'un mois additionnel de sentence redoutée », affirment les chercheurs. Autrement dit, « une punition plus sévère n'implique pas une plus grande sensibilité à la menace d'une punition future, mais plutôt l'inverse ». En accroissant les peines de certains délinquants, le système Dati va les immuniser contre la crainte d'une peine ultérieure. La récidive risque donc d'augmenter au lieu de diminuer. La garde des Sceaux va-t-elle remanier sa loi ?
Les echos 13 août 2007

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