04 juin, 2007

Des industriels reprochent à Bruxelles de ne pas les protéger contre le dumping

La démarche ne devrait pas rassurer Nicolas Sarkozy et les tenants d'une Europe plus "protectrice". Dix associations industrielles très exposées à la concurrence mondiale accusent Peter Mandelson, le commissaire européen au commerce, d'avoir discrètement assoupli la façon dont il gère les enquêtes antidumping, au détriment des entreprises européennes.


"Ces changements suscitent des difficultés croissantes pour obtenir le lancement de procédures, et, si elles sont lancées, des mesures significatives", dénoncent ces fédérations dans un courrier adressé le 29 mai à José Manuel Barroso, le président de la Commission européenne.

Parmi les signataires figurent les industriels de la chimie, des métaux, du coton, ou des minerais, qui considèrent que M. Mandelson et ses services trompent les Etats membres. Pour eux, cette nouvelle politique introduit "un biais anti-industriel, aux conséquences inacceptables" puisqu'elle facilite les exportations vers l'Union de produits très peu chers, vendus en deçà de leurs coûts de production dans les pays émergents.

"Les règles n'ont pas changé, ni la façon de les appliquer", se défend-on auprès de M. Mandelson. Ses services confirment toutefois les chiffres mis en avant par les dix associations industrielles. Aucune nouvelle enquête n'a été lancée depuis le début de l'année, après les 36 cas ouverts en 2006. "En moyenne, une trentaine de dossiers sont traités chaque année. On est dans la moyenne sur dix-huit mois", explique un proche du commissaire Mandelson.

EVENTUELLE RÉFORME

D'après les industriels, la Commission a modifié ses méthodes, avant même d'attendre l'issue des débats en cours à propos d'une éventuelle réforme des instruments de défenses commerciaux à la disposition des Vingt-Sept. Un sujet qui suscite une intense bataille de lobbying à Bruxelles.

Pour M. Mandelson, une telle refonte serait d'autant plus nécessaire que les Etats membres ont beaucoup de mal à se mettre d'accord pour imposer des sanctions antidumping, comme l'ont montré en 2006 les passes d'arme à propos des procédures engagées contre les chaussures chinoises et vietnamiennes. Parfois aussi, ce sont les industriels européens installés dans des pays émergents qui demandent à la Commission d'interrompre des enquêtes.

Les intentions prêtées à M. Mandelson, que certains ont d'abord soupçonné de vouloir démanteler le dispositif européen, mobilisent les capitales les plus soucieuses de protéger leurs industries. La France, l'Italie, l'Espagne mais aussi l'Allemagne ont fait savoir qu'il n'était pas question d'abandonner les procédures antidumping.

En face, les pays plus libéraux, comme le Royaume-Uni et la Suède, ont au contraire appuyé la démarche de M. Mandelson, afin, dans l'intérêt des consommateurs, de tirer les prix vers le bas.

La consultation menée entre décembre et mars a généré plus de 550 contributions de la part des Etats membres et des milieux d'affaire. D'éventuelles propositions ne sont pas annoncées avant l'automne. "S'il y a des changements, ils devraient être mineurs", dit-on déjà dans l'entourage de M. Mandelson... pour rassurer.

Le Monde, 4 juin 2007

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