20 avril, 2006

Aux Pays-Bas, l'argent n'a pas d'odeur

Fidèle à sa réputation de pays d'accueil, le royaume batave est l'une des destinations européennes favorites des blanchisseurs d'argent sale de la planète. Somme rondelette, 24,6 milliards d'euros blanchis issus d'activités criminelles menées à l'étranger sont recyclés chaque année dans les circuits de l'économie néerlandaise, dont 20,8 milliards d'euros en provenance de l'étranger. Principaux contributeurs, les Etats-Unis, avec 8,9 milliards d'euros réinjectés par la pègre américaine, suivis par la mafia russe (1,74 milliards).

Au total, cette bulle financière porte sur environ 4,4 % du PIB néerlandais. Un chiffre impressionnant, qui est pourtant loin d'inquiéter les éminents professeurs d'économie du pays. Au contraire. Poussant le cynisme jusqu'au bout, les conclusions de leur enquête menée à la demande du ministère de la Justice sont sans fioritures. « Vu d'un point de vue économique, l'argent sale, une fois blanchi, produit des effets macroéconomiques identiques à ceux de l'argent propre. Ces effets seraient même plus positifs que négatifs », affirme Brigitte Unger, professeur d'économie à l'université d'Utrecht, dans le document déposé sur le bureau du ministre de la Justice, Piet Donner, un « père la morale » qui prône le rétablissement des cours de religion obligatoires à l'école et qui mène une bataille contre l'établissement de nouveaux casinos.

Ces économistes peuvent bien choquer, ils disent pourtant la vérité. Du simple fait que cet argent n'arrive aux Pays-Bas qu'une fois les activités criminelles commises à l'étranger, le phénomène est sans effet sur le taux de criminalité enregistré dans le pays. En outre, cette injection de capital est génératrice de revenus et de croissance, en premier lieu dans les secteurs de l'immobilier et des biens de consommation. Il dope aussi la création d'emplois et décrispe le marché du travail, poursuit très sérieusement la même étude.

L'ultime conclusion du rapport apporte cependant une inflexion à cette ode immorale à la lessiveuse : une politique de laisser-faire finirait par transformer le royaume batave en un paradis fiscal attirant non seulement l'argent sale, mais les criminels eux-mêmes. « Vade retro, Satana ! »

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