26 août, 2005

Autoroutes : quatre questions de bon sens

La première question a trait à la valeur des actifs cédés (ASF, Sanef, APRR) et s'énonce ainsi : est-ce que l'Etat va faire une bonne affaire financière, ce qui semble être sa principale motivation ? D'un côté, la cession des sociétés autoroutières devrait rapporter immédiatement quelque 11 milliards d'euros à l'Etat. De l'autre, l'Etat, s'il gardait ces actifs, pourrait engranger, d'ici 2032, terme des concessions, entre 35 et 40 milliards de dividendes de ses participations. La moindre des choses serait de mettre sur la table les éléments de calcul - taux d'intérêt, inflation escomptée, prise en compte des risques et des aléas potentiels - qui permettent de voir si l'Etat est plutôt gagnant ou perdant à une cession immédiate.

Deuxième question non moins essentielle : cette privatisation va-t-elle permettre de poursuivre le maillage du territoire français en autoroutes ? Car, contrairement à une idée reçue, la couverture de la France en axes autoroutiers est loin d'être achevée. Beaucoup de tronçons restent à construire. C'est le cas, entre autres, dans le Languedoc (jonction entre l'A75 et l'A9 et achèvement de l'A750), en Rhône-Alpes (contournement ouest de Lyon, tronçon Lyon-Balbigny dans la Loire) ainsi que dans les Pyrénées (liaison Pau-Langon). On estime qu'il faut encore construire environ 4.000 kilomètres pour parvenir à un maillage complet du territoire. A raison d'une centaine de kilomètres réalisée en moyenne chaque année, on voit donc qu'on est encore loin du compte. Les trois sociétés autoroutières, une fois privatisées, poursuivront-elles cet effort - que certains chiffrent à 1 milliard d'euros par an d'ici 2008 - alors qu'elles seront de plus en plus soumises aux impératifs de rentabilité exigés par le marché ?

La troisième interrogation concerne l'Agence de financement des infrastructures de transport de France (AFITF). Quelles seront les ressources de l'AFITF, instrument clef de l'aménagement du territoire mais aussi outil de préservation de l'environnement grâce au financement d'alternatives à la route, lorsqu'elle sera privée de la manne des autoroutes ? Le Premier ministre a indiqué que l'Agence serait à l'avenir financée de trois manières. Elle recevra le produit de la taxe d'aménagement du territoire, la redevance domaniale des sociétés autoroutières et environ 40 % des amendes des radars automatiques. Soit une somme de 770 millions d'euros en 2006 à laquelle s'ajouterait une dotation de l'Etat d'un montant équivalent. Sachant que les gouvernements n'hésitent pas à revenir sur les engagements de leurs prédécesseurs, peut-on penser que l'AFITF pourra compter à l'avenir sur des ressources pérennes ?


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